« Nathalie, pourquoi tu cries ? »
Morgane Visconti m’a d’abord demandé de crier devant son objectif et d’écrire, par la suite, un texte répondant à la question « Pourquoi tu cries Nathalie ? » pour son projet « Les cris tacites »
Un cri doux-amer s’empare de moi près de la rue Saint Jean.
Il est cette cruelle réalité de nos différences sociales que tu aimes à relever ou que parfois tu aimes à lisser sans en mesurer les conséquences. Te rends-tu compte que face à l’égalité de nos intelligences, de nos capacités physiques, psychiques, de notre endurance mentale, toi, contrairement à moi, et c’est tant mieux, tu ne connaîtras pas la précarité, tu ne connaîtras pas, a priori, le risque ni le sacrifice, ni la honte, ni l’humiliation ? Toi, qui votes pour « quelqu’un qui a des couilles » face à quelqu’un de « mou », toi qui fréquente le futur CAC 40, tu restes circonspect face à la critique, aux alternatives, à une certaine colère sociale. Tu ne comprends pas « le négativisme », « le pessimisme », le « manque de confiance ». Dans mon travail, ma passion, viscéralement liée à ce que je suis, ce que je veux être et ce que je serai, les critiques sont permanentes, souhaitables et constructives. Je ne souhaite pas que l’on me flatte, je veux faire du bon boulot, en être fière. La critique entre dans mon travail. Mais je peux être critique de la critique, bien sûr.
Nous ne sommes pas obligés de nous aimer mais nous sommes obligés de vivre ensemble. Je veux mieux te comprendre et je veux que toi aussi tu t’emploies à me comprendre. Cela tu ne l’as pas envisagé. Et tu as tort.
L’élan n’est pas suffisant, il faut du sens, des convictions, il faut de la détermination, de l’empathie, un intérêt général, un bien commun, une joie de vivre.
Il faut de l’amour, une prise affective dans ce que nous faisons.
Je suis cris de joie et d’espoir aujourd’hui, je suis cris de duel aussi.
Dans l’échange et dans nos différences il y a un feu fécond, ne le tarit pas.
A bientôt.
Photographie de Morgane Visconti.